Communication

Maîtriser le reflet empathique pour une communication authentique

Par Geneviève Bertrand, le 17 février, 2023

Vous rentrez du travail. Votre conjoint.e vous accueille à la cuisine.

Conjoint.e : Comment a été ta journée?

Vous : C’était vraiment une journée épuisante! Tout le monde semblait avoir besoin de me parler. Comme je n’ai pas eu une seconde à moi, je n’ai pas pu travailler sur le document que mon patron m’a demandé pour demain. Je suis vraiment stressé.e!

Laquelle de ces réponses vous semble la plus empathique?

  1. Pauvre toi! Viens manger, ça va te faire du bien.
  2. Au moins il te reste encore la soirée pour travailler ton document. Je peux m’occuper des enfants.
  3. Bon… encore une soirée où tu rentres épuisée!
  4. Tu te sens ÉPUISÉ.E après cette grosse journée et tu aurais besoin de CALME ce soir pour te déposer et travailler sur ton document c’est cela? 

L’approche de la CNV propose le reflet empathique (réponse 4) pour favoriser la connexion avec l’autre en créant un espace d’écoute et de confiance. Il consiste à émettre une hypothèse sur les sentiments et les besoins de la personne qu’on écoute et de demander si cela correspond à son expérience. Le reflet a deux fonctions : 

  1. S’assurer que je suis bien avec la personne qui parle, que je la comprends bien;
  2. Indiquer à cette personne que je suis bien à l’écoute, que je suis avec elle.

Le reflet empathique est une technique puissante, car elle permet à l’autre personne de se sentir entendue et comprise, en créant un espace de confiance et de bienveillance qui favorise la communication. En utilisant cette technique de manière régulière, nous pouvons améliorer nos relations et notre capacité à comprendre les besoins des autres.

Dans sa plus simple expression, le reflet empathique se formule ainsi :

« Est-ce que tu te sens [sentiment] parce que tu as besoin de [besoin] ? »
(Cliquez ici pour consulter la liste des sentiments et des besoins)

Le reflet empathique se compose donc de deux éléments principaux : le sentiment et le besoin. Tout d’abord, on répète le sentiment que l’autre personne a exprimé. Par exemple: “Je comprends que tu te sens triste”. Ensuite, on exprime le besoin sous-jacent à cette sensation, en utilisant des mots qui résonnent avec la personne puis en lui demandant confirmation. Par exemple : “Tu as besoin de soutien et de compréhension en ce moment, c’est ça?”. Enfin, on pourrait formuler une demande pour soutenir cette personne dans la satisfaction de son besoin. Par exemple : “Est-ce que tu voudrais que nous parlions un peu plus de ce qui se passe pour toi ?”.

Voici quelques points à considérer pour maîtriser l’art du reflet empathique et que celui-ci soit efficace (extrait de la formation Empathie) :

1. Refléter le rêve du besoin comblé (plutôt que le manque)

Les besoins sont l’énergie de vie qui s’exprime à travers chacun.e de nous. On peut aussi dire que les besoins sont des aspirations, ce qui nous tient à coeur, ce que nous valorisons, ce qui est important et critique pour nous. Se connecter à cette énergie vitale est un moteur puissant.

Lorsque nous offrons un reflet empathique, il est donc important de se brancher à l’énergie du besoin comblé plutôt qu’à l’énergie du besoin non satisfait. Cela contribue à faire émerger des solutions créatives et constructives pour répondre aux besoins, plutôt que de focaliser uniquement sur le problème ou le besoin non satisfait.

Par exemple :

Personne 1 : “Je me sens triste et déprimé ces derniers temps, je n’ai pas beaucoup d’énergie pour faire quoi que ce soit.”

Personne 2 : “Ça te rend TRISTE (sentiment) de prendre conscience de ton niveau d’énergie. Tu aurais besoin de REPOS (besoin) c’est cela?

Personne 1 : “Oui, j’aimerais bien prendre une journée de congé pour me reposer et me ressourcer.”

Dans cet exemple, la personne 2 offre un reflet empathique à la personne 1 en répétant avec ses propres mots ce qu’elle vient de dire et en tentant de deviner quel besoin la personne 2 aurait besoin de combler. Cela permet à la personne 1 de se sentir entendue et comprise, ce qui peut aider à trouver des solutions pour faire face à sa tristesse et à son manque d’énergie.

2. Offrir un reflet sous forme de question (plutôt que d’affirmation – on tente de deviner).

Il est recommandé de formuler un reflet empathique sous forme de question. Cela permet de vérifier que notre compréhension est exacte et peut encourager l’autre personne à s’engager davantage dans la conversation. Voici quelques raisons pour lesquelles il est important de formuler un reflet empathique sous forme de question :

a) Pour vérifier notre compréhension : en formulant un reflet empathique sous forme de question, nous donnons à l’autre personne l’opportunité de confirmer ou de corriger notre compréhension de ses sentiments et de ses besoins. Cela peut éviter les malentendus ou les erreurs d’interprétation qui peuvent survenir si nous supposons simplement que nous avons bien compris.

Il n’est pas important de trouver le bon besoin, l’essentiel est d’être dans une intention de connexion avec l’autre. Soyez sans crainte, votre interlocuteur.trice saura pointer vers le bon besoin si vous faites fausse route et c’est ce qui est important dans le processus.

b) Pour encourager la participation : en posant une question, nous indiquons à l’autre que nous sommes intéressé.e et que nous voulons en savoir plus sur ce qu’elle ressent. Cela peut encourager l’autre personne à s’engager davantage dans la conversation et à se sentir écoutée et comprise.

c) Pour éviter le jugement : lorsque nous formulons un reflet empathique sous forme de question, cela nous aide à éviter de projeter nos propres jugements ou opinions sur l’autre personne. En posant une question ouverte, nous permettons à notre interlocuteur.trice de nous dire ce qu’elle ressent et ce dont elle a besoin, sans être influencée par notre point de vue.

Par exemple :

Personne 1 : “Je suis vraiment dépassé en ce moment, j’ai beaucoup de travail à faire et je me sens débordé.e”

Personne 2 : “Je comprends que tu te sens DÉBORDÉ.E (sentiment) à cause de la charge de travail que tu as en ce moment. Tu aurais besoin de plus de SOUTIEN (besoin) au bureau c’est cela?

Personne 1 : ” En fait, j’ai surtout besoin de retrouver la LÉGÈRETÉ et le PLAISIR (besoin) que je ressentais auparavant en faisant mon travail.”

Dans cet exemple, la personne 2 formule son reflet sous forme de question. Elle émet l’hypothèse que le besoin à combler est le SOUTIEN. Cela permet à la personne 1 de se sentir entendue et dans ce cas, lui permet d’accéder par elle-même à plus de clarté sur ce dont elle a besoin. Elle rectifie l’hypothèse émise par la personne 2 en référant à d’autres besoins qui sont résonnent davantage pour elle.

3. Éviter de refléter les opinions.

En reflétant une opinion ou un jugement, nous ne sommes plus « chez l’autre », nous ramenons alors la conversation à soi. Cela pourrait être perçu comme une critique ou un rejet, ce qui risque de provoquer une réaction de défense de la part de l’autre et entraver la communication et la confiance. Les opinions et les jugements sont à éviter lorsque l’on est dans une posture empathique.

Par exemple :

Personne 1 : “Je suis en colère contre mon patron qui a refusé ma demande de congé”

Un reflet empathique approprié pourrait être :

Personne 2 : “Je comprends que tu sois vraiment FÂCHÉ.E (sentiment) contre ton patron pour avoir refusé ta demande. Tu aurais aimé un peu plus de CONSIDÉRATION (besoin) c’est cela?

Si nous partageons plutôt une opinion en disant…

Personne 2 : “C’est quand même le 3e congé que tu demandes cet hiver… Je pense que ton patron avait raison de refuser cette fois-ci.”

…l’impact ne sera pas du tout le même que celui généré par le reflet empathique!

Faites l’expérience en vous imaginant vous-même dans la peau de celui ou celle qui est en colère contre son patron ou sa patronne…

Quel serait l’impact d’une telle réponse?

Seriez-vous alors sur la défensive?

Deviendriez-vous encore plus en colère?

Auriez-vous envie de continuer cette discussion?

Vous sentiriez-vous compris.e et écouté.e?

En fait, quel(s) besoin(s) ne seraient pas nourris par une telle réponse?

4. Faire des reflets en « girafe de rue » (en langage usuel, adapté à la personne et/ou la situation).

Faire des reflets en « girafe de rue » signifie utiliser les principes de la CNV pour communiquer de manière plus efficace dans des situations quotidiennes, telles que les interactions avec des amis, des membres de la famille, des collègues ou des étrangers.

En d’autres termes, communiquer en « girafe de rue » en CNV signifie éviter d’utiliser un jargon trop formel et rigide, et se concentrer plutôt sur l’essentiel de la CNV, qui est de se connecter aux besoins et aux sentiments de l’autre personne. Cela peut inclure l’utilisation de formules plus simples et plus directes, et l’adaptation du langage à la situation et aux personnes impliquées.

Voici quelques alternatives à la formule « Est-ce que tu te sens … parce que tu as besoin de…?

Pour : « Est-ce que tu te sens…? »

  • Est-ce que ce que tu vis c’est…?
  • Est-ce qu’il y a du/de la …?
  • Est-ce que tu es… ?
  • Tu as l’air…?
  • Tu me sembles…?

Pour : « …parce que tu as besoin de…? »

  • Est-ce que ce qui est important pour toi c’est…?
  • Est-ce que tu aimerais plus de…/davantage de…?
  • Est-ce que ça parle de…?
  • Est-ce que c’est en lien avec…?
  • Est-ce que tu as envie de…?
  • Est-ce que tu as le goût de plus de…?
  • Est-ce que ça t’apporterait…?

5. Refléter au même niveau de ce dont la personne est consciente d’elle-même (éviter de deviner des motivations sous-jacentes loin loin).

Lorsqu’on essaie de deviner ou d’interpréter les motivations sous-jacentes de la personne, on risque de mal comprendre ses sentiments et ses besoins, et de la conduire à se sentir bousculée, jugée ou critiquée. Cela peut également entraîner des erreurs d’interprétation qui peuvent compliquer davantage la communication et la compréhension mutuelle.

En faisant un reflet empathique au même niveau que ce dont la personne est consciente, on montre qu’on est à l’écoute de sa perspective et de son point de vue, sans essayer de la convaincre ou de la diriger vers une interprétation différente. Cela crée un espace de confiance et de respect mutuel.

Par exemple :

Personne 1 : “Je suis vraiment déçu.e de mon collègue, il n’a pas respecté notre accord et cela a créé beaucoup de problèmes.”

Personne 2 : “J’entends toute ta déception face à ton collègue. Tu aurais aimé plus de RESPECT (besoin) de sa part ?”

Si on allait plus loin, on pourrait imaginer qu’en fait, il y a quelque chose qui touche au sens de sa valeur ou à l’intégrité mais nous avons fait le choix de rester sur le besoin plus superficiel auquel notre interlocuteur.trice nous donne accès.

6. Porter attention aux permissions que vous avez ou n’avez pas – commencer avec reflets « légers », synthèse – pour établir la confiance.

Porter attention aux permissions que vous avez ou n’avez pas lorsque vous faites un reflet empathique est important, car cela vous permet de respecter les limites de l’autre personne et de renforcer la confiance.

Si vous commencez immédiatement avec un reflet qui explore les émotions et les motivations les plus profondes de la personne, vous risquez de la mettre mal à l’aise ou de la faire sentir vulnérable.

En commençant par des reflets « légers », vous montrez à la personne que vous êtes à l’écoute de ses sentiments et de ses besoins, tout en respectant ses limites et en lui donnant la permission de décider du niveau de détail qu’elle souhaite partager.

🦨 Attention de ne pas devenir une mouffette de la CNV!

Vérifiez si nos reflets emphatiques semblent générer de la connexion et de la confiance OU le contraire…

Souvent, on devient une moufette de la CNV quand :

  1. On a un projet sur l’autre (l’intention c’est la connexion)
  2. On va plus loin que le niveau de vulnérabilité souhaité par l’autre (attention aux permissions)
  3. On tient à nos reflets, etc. (on émet des hypothèses tout simplement)

Notre proposition, c’est de rester attentif.ve aux indices qui nous parlent du niveau de confiance et de connexion chez l’autre et dans la relation.

En Résumé :

Avant toute chose, détendez-vous en vous rappelant que la qualité de présence et l’intention sont beaucoup plus importantes que de trouver les bons mots.

Le reflet empathique, consiste à émettre une hypothèse sur les sentiments et les besoins de la personne qu’on écoute et de demander si cela correspond à son expérience. Le reflet se formule ainsi :

« Est-ce que tu te sens [sentiment] parce que tu as besoin de [besoin] ? »
(Cliquez ici pour consulter la liste des sentiments et des besoins)

  1. Toujours offrir un reflet sous forme de question (on émet une hypothèse)
  2. Éviter de refléter les opinions
  3. Refléter le rêve du besoin (plutôt que le manque)
  4. Faire des reflets en « girafe de rue » (en langage usuel, adapté à la personne et/ou la situation)
  5. Refléter au même niveau de ce dont la personne est consciente d’elle-même (éviter de deviner des motivations sous-jacentes).
  6. Porter attention aux permissions que vous avez ou n’avez pas – commencer avec reflets « légers », synthèse – pour établir la confiance.

Téléchargez l’aide-mémoire, extrait de l’atelier Intermédiaire Empathie : le pouvoir de l’écoute

À propos de l’autrice

Geneviève Bertrand s’est jointe à l’équipe de Spiralis après avoir complété l’ensemble des formations au fil des ans. L’atelier Intermédiaire Empathie compte parmi les plus marquants de son parcours d’apprentissage CNV car il lui a permis de découvrir concrètement l’écoute empathique et ainsi accéder au niveau de connexion auquel elle aspire avec les gens qui l’entoure. 

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